Hopi Elders
Messages to the World
IN THEIR OWN WORDS

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Depuis le début de la vie jusqu'au jour de la
Purification Enseignements,
Histoire et Prophéties du Peuple Hopi

Raconté par Dan Katchongva, du Sun Clan,
qui vécut de 1865 à 1972 Traduit en anglais par
Danaqyumptewa Edité par Thomas Francis Traduit en
français par Didier Wolfs

Publié en 1972 par le Committee for Traditional
Indian Land and Life Los Angeles, California.

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Introduction par Thomas Francis

Dan Katchongva, le dernier leader du Clan du
Soleil d'Hotevilla, vécut plus de cent ans. Cette
longue vie lui permit d'être un témoin privilégié
de la bataille que se livrèrent l'ancien monde et
le monde moderne et de voir de nombreuses
prophéties se réaliser. Il eut l'occasion de
vivre l'évolution de son peuple, depuis la vie
paisible dans les villages jusqu'aux terribles
interférences dont les Hopi furent victimes
depuis la fin du monde précédent.

Dans une conversation enregistrée le 29 janvier
1970, Dan raconta l'histoire du Peuple de Paix,
depuis l'aube des temps jusqu'à l'attaque qui
mena à la fondation d'Hotvela en 1906. Il parla
de l'école, de l'argent et de la police, autant
de systèmes qui menaçaient de faire disparaître
le mode de vie des Hopi pour cette génération et
des conséquences que cette disparition
entraînerait pour l'Amérique et le monde.

La publication de cette conversation naquit de
l'idée que si ceux qui causent cette tragédie, et
les millions de personnes qui les supportent,
avaient une toute petite idée des raisons qui
poussent les Hopi à résister à toute ingérence
étrangère, ils ne persisteraient pas dans cette
voie.

Dan accepta la publication de ce livre à
condition qu'il ne soit jamais vendu, insistant
que vendre les enseignements Hopi reviendrait à
vendre sa propre mère.

Il choisit lui-même les extraits qui pouvaient
être publié, et la justesse de la traduction fut
méticuleusement vérifiée par son interprète,
Danaqyumptewa, qui donna toute leur importance
aux mots originaux.

En plus des prophéties qui se sont accomplies
durant sa vie, Dan fut averti par son père qu'il
verrait le commencement de l'événement final, le
Grand Jour de la Purification. Dan Katchongva
mourut en 1972

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"Tout ce que je possède est mon bâton pour
planter et mon maïs. Si vous voulez vivre comme
moi... vous pouvez vivre ici avec moi."


Le commencement de la vie

Nous avons été créés quelque part dans le monde
souterrain par le Grand Esprit, le Créateur. Il
nous a d'abord créé un, puis deux, puis trois.
Nous avons été créés égaux, en unité, vivant de
manière spirituelle, là où la vie est éternelle.
Nous étions heureux et en paix avec nos
semblables. Tout était abondant, fourni par notre
Mère Terre sur laquelle nous avions été placés.
Nous n'avions pas besoin de planter ou de
travailler pour obtenir de la nourriture. La
maladie et les difficultés étaient inconnues.
Durant de nombreuses années, nous avons vécu
heureux et notre nombre ne cessa d'augmenter.

Lorsque le Grand Esprit nous a créés, il nous
donna aussi des instructions ou des lois que nous
devions respecter. Nous lui avons promis de les
respecter afin de pouvoir rester paisibles, les
utilisant comme règles pour vivre heureux sur
cette terre où il nous avait créés et placés.
Mais dès le début, il nous avertit que nous ne
devions pas nous laisser tenter par certaines
choses qui pourraient nous faire perdre cette
parfaite façon de vivre.

Bien sûr, nous profitions de beaucoup de choses
dans cette vie, et peu à peu, nous avons enfreint
les ordres du Créateur en faisant ce qu'il nous
avait dit de ne pas faire. Aussi, il nous punit
en faisant de nous ce que nous sommes
aujourd'hui, avec une âme et un corps. Il dit :
"A partir de maintenant, vous allez devoir vous
débrouiller tout seul. Vous serez malades, et la
durée de votre vie sera limitée."

Il fit nos corps en partant de deux principes, le
bon et le mal. Le côté gauche est bon car il
contient le cœur. Le côté droit est mauvais parce
qu'il n'a pas de cœur. Le côté gauche est
maladroit mais sage. Le côté droit est
intelligent et fort mais manque de sagesse. Il y
aura en permanence un combat entre les deux
côtés, et par nos actions, nous devrons décider
lequel est le plus fort, le mal ou le bien.

Nous avons bien vécu pendant de nombreuses années
mais finalement le mal prouva qu'il était le plus
fort. Certaines personnes ont oublié ou ignoré
les lois du Grand Esprit et de nouveau, elles
commencèrent à faire des choses qui étaient
contraires aux instructions. Elles devinrent
matérialistes, inventant de nombreuses choses
pour leur profit personnel, et ne partageaient
plus comme elles le faisaient par le passé. Cela
résulta sur une grande division car certains
voulaient encore suivre les instructions
originales et vivre simplement.

Les plus inventifs, intelligents mais manquant de
sagesse, firent de nombreuses choses destructives
qui dérangèrent leur vie et menaça de détruire
tout le monde. Nombre de choses que nous voyons
aujourd'hui sont connues pour avoir existées en
ce temps. Finalement, l'immoralité prospéra. La
vie des gens devint corrompue par une trop grande
liberté sociale et sexuelle. Même les femmes et
les filles des Kikmongwi (les chefs) furent
atteintes, elles qui ne rentraient plus que
rarement à la maison pour s'occuper de leurs
tâches ménagères. Et les grands leaders religieux
avaient le même problème que les Kikmongwi.
Bientôt les leaders et tous ceux qui avaient bon
cœur s'inquiétèrent car la vie des gens devenait
incontrôlable.

Les Kikmongwi rassemblèrent  les grands prêtres.
Ils fumèrent et prièrent pour recevoir de l'aide
afin de trouver un moyen de résoudre la
corruption. Ils se rassemblèrent plusieurs fois
et finalement quelqu'un suggéra de partir et de
trouver un nouvel endroit pour commencer une vie
nouvelle.


Apparition dans le monde actuel

Ils avaient souvent entendu des bruits sourds
venant d'en haut. Ils savaient que quelqu'un
pouvait vivre là. Il fut décidé que cette idée
devait être investiguée. Je vais décrire cela
brièvement car raconter toute l'histoire
prendrait trop de temps.

Doués de sagesse, ils créèrent des oiseaux. Je
vais en nommer trois. Deux sont connus pour leur
force et leur rapidité, le kisa (l'aigle) et le
pavowkaya (l'hirondelle). Le troisième était un
moochnee (l'oiseau moqueur). Son vol est
maladroit mais il est connu pour être sage. Ils
furent chacun créé à un moment différent par des
chants magiques, de la fumée de tabac et des
prières, et par de la poussière et de la salive
recouvertes d'un capuchon blanc (l'ova). Chacun
fut respectueusement accueilli et reçut les
instructions de sa mission, s'il réussissait. Les
deux premiers ne réussirent pas à atteindre la
partie supérieure du ciel mais le troisième,
moochnee, passa par une ouverture et se retrouva
dans ce monde.

Le nouveau monde était très joli. La terre était
verte et en pleine floraison. L'oiseau respecta
toutes les instructions. Son sens de la sagesse
le guida vers l'être qu'il était sensé chercher.
Quand il le trouva, il était midi car l'être,
Maasau'u, le Grand Esprit, était en train de
préparer son repas. Des épis de maïs se
trouvaient à côté du feu. L'oiseau descendit et
atterrit sur le toit de sa kisi (maison) et
annonça son arrivée.

Maasau'u ne fut pas surpris par le visiteur car
sa sagesse et son odorat l'avaient prévenu que
quelqu'un arrivait. Il l'accueillit
respectueusement et l'invita à s'asseoir. Leur
conversation fut brève : "Pourquoi es-tu ici ?
Serait-ce important ?" "Oui", répondit le
Moochnee, " J'ai été envoyé ici par les gens du
monde souterrain. Ils souhaitent venir dans ton
monde et vivre avec toi car leur façon de vivre
est corrompue. Avec ta permission, ils voudraient
venir ici avec toi et commencer une nouvelle vie.
C'est pour cela que je suis venu". Maasau'u
répondit brusquement mais avec respect, "Ils
peuvent venir."

L'oiseau retourna avec ce message vers le monde
souterrain. Pendant son absence, les Kikmongwi et
les leaders avaient continué de prier et
d'attendre son retour couronné de succès.
Lorsqu'il revint avec les bonnes nouvelles du
nouveau monde et la permission de Maasau'u, ils
furent remplis de joie.

Maintenant, la question était de savoir comment
ils allaient atteindre le sommet du monde. Ils se
remirent à fumer et à prier pour recevoir de
l'aide. Finalement, ils furent tous d'accord pour
planter un arbre qui grandirait et qui leur
servirait de sentier. Ils plantèrent une graine
de shalavee (épicéa), prièrent et chantèrent des
chants magiques. L'arbre grandit et grandit
jusqu'à atteindre le ciel mais ses branches
étaient si légères et si nombreuses qu'il courba
sous la pression de la terre qui se trouvait
au-dessus et il ne réussit pas à percer le ciel.
Ils plantèrent une nouvelle graine, cette fois
celle d'un lougu (pin). Il grandissait alors
qu'ils chantaient leurs chants magiques. Cet
arbre était solide et fort. "Sûrement que
celui-ci va arriver à passer", pensaient-ils.
Mais ce ne fut pas un succès car ses branches se
courbèrent également lorsqu'elles entrèrent en
contact avec l'objet solide. Ils plantèrent une
nouvelle graine. C'était cette fois celle d'un
pakave (roseau).  Comme il se terminait en
pointe, il réussit à percer le ciel et à passer
dans le nouveau monde.

Pendant ce temps, tout ceci avait été gardé
secret. Seuls les gens convenables, vertueux et
avec-un-seul-coeur avaient été informés des plans
pour quitter le monde corrompu. Ils étaient
préparés à partir et dès qu'ils surent que la
tentative avait réussi, ils commencèrent à
grimper sur la plante, se reposant entre les
joints du roseau, et continuant ainsi leur route
vers l'ouverture.

Lorsqu'ils arrivèrent dans ce monde, tout était
beau et paisible. La terre était vierge et
n'avait pas été molestée. Ils étaient très
heureux. Ils chantèrent et dansèrent avec joie,
mais leur joie fut de courte durée car cette
nuit-là, la fille du chef mourut soudainement.
Tout le monde était triste et inquiet. Les gens
se regardaient de façon suspicieuse. Un sortilège
avait été jeté. Cela leur fit penser qu'une
sorcière ou qu'une personne à-deux-coeurs était
parmi eux.

Le Kikmongwi avait un grand pouvoir et il devait
l'utiliser pour calmer l'inquiétude de son
peuple. Il fit une petite boule de farine de maïs
qu'il lança au-dessus du groupe. Celui sur la
tête duquel la boule atterrirait serait le
coupable. Elle atterrit sur la tête d'une jeune
fille. Ils décidèrent rapidement de la jeter dans
l'ouverture qui conduisait au monde souterrain.
Ils devaient se débarrasser de la malveillance
car ils désiraient vivre en paix sur cette
nouvelle terre. Mais la sorcière implora leur
pitié, leur disant que durant le long voyage qui
les attendait, ils allaient devoir faire face à
de nombreux obstacles et dangers de toutes sortes
et qu'alors, ses services seraient bien utiles
car elle avait le pouvoir de combattre le mal.
Elle invita le Kikmongwi à regarder dans le monde
souterrain. Il regarda et vit son enfant en train
de jouer gaiement avec d'autres enfants, dans le
monde souterrain où nous retournerons tous après
notre mort. Elle fut épargnée mais il la laiss
èrent là, seule, espérant peut-être qu'elle
périra d'une cause inconnue.

La première rencontre avec le Grand Esprit dans
ce monde

C'est ici que le Grand Esprit leur apparut pour
la première fois sur cette terre, leur donnant
des instructions sur leur façon de vivre et de
voyager. Ils se divisèrent en groupes, chacun des
groupes choisissant ses leaders. Il posa devant
eux des épis de maïs de tailles différentes. Il
leur dit de prendre un épi de maïs qu'ils
devraient emmener dans leur voyage pour avoir de
quoi vivre et survivre. Un par un, ils prirent
avidement les épis les plus longs et les plus
parfaits jusqu'à ce qu'il ne reste plus que le
plus petit. Ils ne réalisèrent pas que c'était
leur sagesse qui était mise à l'épreuve. L'épi le
plus petit fut pris par le leader le plus humble.
Ensuite le Grand Esprit leur donna leurs noms et
leurs langages, par lesquels ils seraient
reconnus. Celui qui, en dernier, prit l'épi le
plus petit fut nommé HOPI.

HOPI ne signifie pas seulement "être paisible",
mais obéir et avoir foi dans les instructions du
Grand Esprit, ne pas déformer ses enseignements
pour l'influence ou le pouvoir et en aucune façon
ne corrompre la manière de vivre des Hopi.
Autrement, le nom sera repris.

Il leur donna alors des instructions sur la façon
dont ils devaient émigrer, dans un but bien
précis, vers les quatre coins de la nouvelle
terre, laissant derrière eux de nombreuses
empreintes de pieds, des écritures sur les
rochers et des ruines pour le temps où beaucoup
auront oublié qu'ils ne formaient qu'un, unis par
un but commun lorsqu'ils arrivèrent par le
roseau.

Maintenant que nous étions en haut, nous devions
chacun suivre nos leaders et aussi longtemps que
nous n'oublierions pas les instructions du Grand
Esprit, nous serions capables de survivre. Nous
étions liés par le vœu de respecter ces
instructions et d'accomplir notre migration.
Maasau'u nous dit que celui qui serait le premier
à le trouver serait le leader de ceux qui
viendraient ensuite, et il disparut.



Un acte de conséquence prophétique.

Nous avons voyagé durant de nombreuses années
vers chaque coin du continent, laissant partout
des traces de notre passage et ces traces en
témoignent encore clairement aujourd'hui. En
route, nous nous sommes arrêtés pour nous reposer
près de la grande rivière connue aujourd'hui sous
le nom de Colorado. Nous étions allés loin et
avions acquis beaucoup de connaissances, en
n'oubliant jamais nos instructions. Le leader du
groupe était du Clan de l'Arc, un grand chef qui
avait de la sagesse. Mais c'est ici que ce grand
chef disparut dans la nuit noire. Après avoir
couché sa famille, il partit à la recherche du
Centre de la Terre, où les gens intelligents et
ingénieux de toutes les nations se rencontrent
pour planifier le futur. Il parvint à trouver
l'endroit et fut accueilli avec respect. C'était
un endroit très joli, avec de bonnes choses. De
la bonne nourriture fut déposée devant lui par
les plus jolies filles. Tout cela était très
tentant.

Jusqu'à ce jour, nous ne connaissons pas la
signification de cette action. Cela avait quelque
chose à voir avec le futur. Par cette action, il
causa un changement dans notre façon de vivre car
nous approchions de la fin d'un cycle de vie de
ce monde, beaucoup d'entre nous allaient chercher
le monde matérialiste, essayant de profiter de
toutes les bonnes choses qu'il avait à offrir
avant de nous détruire. Ceux qui étaient restés
fidèles aux instructions sacrées allaient ensuite
vivre prudemment, car ils se souviendront et
auront foi dans ces instructions, et ce sera sur
leurs épaules que reposera le destin du monde.
Les gens corrompront les bonnes façons de vivre,
entraînant un mode de vie identique à celui que
nous avions fui dans le monde souterrain. Le
corps sacré de la femme ne sera plus caché, et
comme le bouclier de protection sera enlevé, cela
entraînera un acte de tentation vers la liberté
sexuelle qui sera vécue avec plaisir. La plupart
d'entre nous seraient perdus dans la co nfusion.
La prise de conscience que quelque chose
d'extraordinaire est en train de se passer se
développera chez la plupart des gens car même
leurs leaders se saliront dans leur confusion. Il
sera difficile de choisir celui nous devrons
suivre.

Les Hopi savaient que tout cela allait arriver.
Tous ces aspects de notre mode de vie actuel
étaient planifiés. Ainsi aujourd'hui, nous devons
nous en tenir fermement à nos croyances pour
pouvoir survivre. La seule issue est de suivre
les instructions du Grand Esprit lui-même.

La mission des deux frères.

Ce chef du Clan des Arcs avait deux fils adultes.
Lorsqu'ils apprirent le méfait de leur père, ils
furent très tristes. Leur connaissance de
l'enseignement qu'ils avaient reçu de leur père
était bonne. Et ils étaient maintenant seuls pour
conduire leur peuple, car le jour suivant, leur
père mourut.

Ils demandèrent à leur mère la permission
d'appliquer les instructions qu'ils avaient
reçues pour un événement de cette nature. Elle
répondit que c'était à eux de décider, leur
connaissance étant complète. Ils décidèrent que
le plus jeune frère allait continuer de chercher
Maasau'u et qu'il s'établirait là où il le
trouverait. Là, il attendrait le retour de son
frère aîné, qui voyagerait vers l'Est et le
soleil levant, où il se reposerait brièvement. En
se reposant, il devait écouter la voix de son
jeune frère qui lui demanderait de l'aide car un
changement dans leur mode de vie aurait dérangé
la façon de vivre de son peuple. Sous la pression
d'un nouveau chef, ils seraient certainement
balayés de la surface de la terre, à moins qu'il
ne vienne.

Ainsi aujourd'hui nous nous en tenons encore
fermement aux instructions du Grand Esprit. Nous
continuerons à regarder et à prier vers l'Est
pour son retour rapide.

Le plus jeune frère avertit l'aîné que la terre
et les gens changeraient. "Mais ne laisse pas ton
cœur se troubler", dit-il, "car tu vas nous
trouver. Beaucoup tourneront le dos à la façon de
vivre de Maasau'u, mais quelques-uns uns d'entre
nous, restés fidèles à son enseignement,
resteront dans nos habitations. L'ancienne forme
de nos têtes, la forme de nos maisons, la
disposition de nos villages, le type de terre sur
lequel nos villages se trouvent et notre façon de
vivre, tout sera en ordre lorsque tu nous
trouveras".

Avant que les premiers hommes aient commencé leur
migration, le peuple nommé Hopi reçu une série de
tablettes en pierre. Sur ces tablettes, le Grand
Esprit inscrivit les lois que les Hopi devaient
suivre pour voyager et vivre de façon bonne et
paisible. Elle contenait aussi un avertissement
auquel les Hopi devaient prendre garde, pour les
temps où ils seraient influencés par des gens
mauvais afin d'abandonner la façon de vivre
prévue par Maasau'u. Il ne serait pas facile d'y
résister car nombreuses seraient les bonnes
choses qui tenteraient beaucoup de bonnes
personnes à abandonner ces lois. Les Hopi se
retrouveraient dans une situation difficile. Les
pierres contiennent les instructions à suivre
dans ce cas.

L'aîné des frères devait emporter une des
tablettes en pierre avec lui vers le soleil
levant et la ramener avec lui lorsqu'il
entendrait l'appel à l'aide désespéré. Son frère
serait en état de désespoir et de confusion. Son
peuple aura abandonné les enseignements, ne
respectant plus les aînés, se retournant même
contre eux  pour détruire leur façon de vivre.
Les tablettes de pierre seront la dernière preuve
de leur identité réelle et de leur fraternité.
Leur mère est le Clan du Soleil. Ils sont les
enfants du soleil.

Ainsi, c'est un Hopi qui voyagea d'ici vers le
soleil levant et qui maintenant attend quelque
part. Par conséquent, il n'y a plus que les Hopi
pour faire encore tourner le monde correctement
et ce sont les Hopi qui doivent être purifiés
pour que le monde soit sauvé. Personne d'autre,
nulle part ailleurs, ne pourra accomplir cela.

L'aîné des frères devait voyager rapidement car
il n'y avait pas de temps à perdre. Et c'est pour
l'aider que le cheval fut créé. Le plus jeune
frère et son peuple continuèrent de chercher
Maasau'u.

En chemin, ils arrivèrent sur une terre qui avait
l'air fertile et chaude. Ici, ils marquèrent les
symboles de leurs clans sur les rochers pour
revendiquer la terre. Cela fut fait par le Clan
du Feu, le Clan de l'Araignée et le Clan du
Serpent. Cet endroit est aujourd'hui appelé
Moencopi. Ils ne s'y installèrent pas à ce moment
là.

Alors que les gens migraient, Maasau'u attendait
ceux qui arriveraient les premiers. En ce
temps-là, il avait l'habitude de se promener dans
les environs de l'endroit où il vivait, portant
un bouquet de du-kyam-see (violettes) à la
ceinture. Un jour, il le perdit le long du
chemin. Lorsqu'il revint le chercher, il vit que
les fleurs avaient été prises par la Femme
Crapaud à Cornes. Lorsqu'il lui demanda de les
lui rendre, elle refusa mais à la place, elle
promit de lui apporter son aide lorsqu'il en
aurait besoin. "J'ai aussi un casque en métal",
lui dit-elle, (ce qui signifie peut-être que des
gens avec un casque en métal aideront les Hopi
lorsqu'ils seront en difficulté).

Souvent, Maasau'u marchait un demi mile (huit
cents mètres) au Nord de son du-pa-cha (une
habitation temporaire) vers un endroit où se
trouve un rocher qui forme un abri naturel et
qu'il a dû choisir comme étant l'endroit où lui
et les premiers hommes se retrouveraient. En
attendant, il s'amusait en jouant à un jeu
d'adresse, jeu dont le non (Nadu-won-pi-kya)
jouerait un rôle important plus tard dans la vie
des Hopi, car c'est ici que la connaissance et la
sagesse des premiers hommes allaient être testée.
Jusqu'il y a peu, les enfants jouaient à cet
endroit à un jeu similaire, quelque chose comme
"cache-cache". Une personne devait se cacher,
puis signaler sa présence en tapant sur le rocher
qui transmettrait le son de façon bizarre afin
que les autres ne puissent savoir exactement d'où
venait le signal. (Il y a quelques années, ce
rocher fut détruit par les constructeurs de
routes du gouvernement.) C'est ici qu'ils
trouvèrent Maasau'u en train d'attendre.

La rencontre avec Maasau'u près d'Oraibi

Avant que ne commencent les migrations, Maasau'u
avait fait savoir, peut-être sans le dire
clairement, que le premier qui le trouverait
serait le leader. Plus tard, il devint clair
qu'il s'agissait là d'un moyen d'évaluer leur
vraie nature.

Lorsqu'ils le trouvèrent, les gens se
rassemblèrent et s'assirent avec lui pour parler.
La première chose qu'ils voulurent connaître
était l'endroit où il vivait. Il répondit qu'il
vivait un peu plus au Nord à un endroit appelé
Oraibi. Pour une certaine raison, il ne le nomma
pas complètement. Le nom complet est Sip-Oraibi,
signifiant quelque chose qui a été solidifié, se
référant au fait que c'est à cet endroit que la
terre fut solidifiée.

Ils demandèrent la permission de vivre là avec
lui. Il ne répondit pas directement car il voyait
le mal en eux. "C'est à vous de décider", dit-il.
"Je n'ai rien ici. Ma vie est simple. Tout ce que
je possède, c'est un bâton pour planter et mon
maïs. Si vous voulez vivre comme moi, et suivre
mes instructions, le mode de vie que je vous
offrirai, vous pouvez vivre ici avec moi, et
prendre soin de la terre. Alors vous aurez une
vie longue, heureuse et fructueuse."

Ensuite, ils lui demandèrent s'il allait être
leur leader, pensant qu'ainsi ils seraient
assurés d'une vie paisible. "Non", répondit-il,
"celui qui vous a amené ici sera votre leader
jusqu'à ce que vous réalisiez votre mode de vie."
(Car il voyait dans leurs cœurs et savait qu'ils
avaient encore beaucoup de désires égoïstes).
Ensuite, je serai votre leader, mais pas avant,
car je suis le premier et je serai le dernier."
Ayant donné les instructions, il disparut.

La fondation du village d'Oraibi.

Le village d'Oraibi fut établi et construit en
accord avec les instructions du Grand Esprit. Le
chef du Clan de l'Arc fut le père de l'ordre
cérémonial. Ils restèrent sous la direction du
Clan de l'Arc pour un certain temps, peut-être
jusqu'à ce que la corruption s'installa. Comme
vous vous en souvenez, le chef du Clan de l'Arc
du passé avait souillé son rang en prenant part
aux changements du mode de vie.

Plus tard, le Clan de l'Ours prit le relais.
Peut-être parce que l'ours est fort et puissant.
Il y a peut-être eu d'autres raisons, comme une
prophétie qui dit qu'un ours, dormant quelque
part dans un endroit au Nord de ce qui est
aujourd'hui appelé Europe, se réveillera et se
rendra au Nord de cette terre. Ce groupe est
appelé le Clan de l'Ours parce qu'ils trouvèrent
un ours mort à l'endroit du symbole du bouclier.
La plupart des gens importants disent faire
partie du Clan de l'Ours, y compris le Clan de
l'Oiseau Bleu et le Clan de l'Araignée.

Le vœu que nous avions fait au Grand Esprit nous
obligeait à suivre son mode de vie. Il nous donna
la terre pour que nous l'utilisions et en
prenions soin par nos services cérémonials. Il
nous instruisit et nous montra la façon dont nous
devions gouverner nos vies. Nous avons inscrit ce
schéma sur un rocher pour que celui-ci nous
rappelle de toujours suivre le droit chemin. Si
les Hopi dévient de cette route, Il nous
reprendra cette terre. Ceci est l'avertissement
que nous a donné Maasau'u.

Le village d'Oraibi fut bien établi. Les peuples
en migration s'y rassemblaient et demandaient à
être admis dans le village. Le Kikmongwi et les
grands prêtres considéraient toujours leurs
demandes et basaient leur jugement sur leur
caractère et leur sagesse. Ceux qui montraient
des signes d'orgueil étaient éconduits et on leur
conseillait d'aller vers les mesas du sud où
vivaient des gens comme eux. Seuls les gens bons,
humbles et sincères dans leurs prières étaient
admis.

Un de ces groupes était le Clan du Coyote. Il
venait de Sh-got-kee (Si-aht-ki), près de Walpi.
Il y avait plusieurs raisons pour qu'on les
considère comme étant mauvais, mais dans un sens,
ils étaient intelligents. Au début, ils ne furent
pas autorisés à joindre le village. Mais
lorsqu'ils firent leur quatrième demande, ils
furent acceptés en accord avec la coutume. Ils
devaient agir en protecteur et en temps de
troubles, ils devaient supporter et aider le
porte-parole. Mais ils furent avertis d'être
prudent. Et c'est la façon dont nous procédâmes
avec tous les clans parce qu'entre-temps, la
plupart d'entre nous avaient voulu tricher ou
tromper les leaders pour obtenir la gloire ou la
renommée ; ce qui nous conduisit à corrompre
notre façon de vivre et à ébranler nos croyances.

Le dernier groupe à être admis à Oraibi fut le
Clan de l'Aigle Gris. Alors qu'ils finissaient
leur migration, ils s'installèrent d'abord à un
endroit appelé aujourd'hui New Mexico. Comme
c'était un peuple qui aimait faire la guerre, et
c'était vraiment des provocateurs, ils furent
chassés par les Indiens Pueblo. Ils se dirigèrent
alors dans notre direction et s'installèrent à
Mishongovi sur le Second Mesa, à la condition
qu'ils n'aillent pas se quereller ou créer des
conflits. S'ils rompaient cette promesse, ils
devraient partir sans résistance. Mais, ils
créèrent un nouveau conflit et partirent comme
promis. Ensuite, ils se rendirent à Oraibi et
demandèrent à y être admis. Après plusieurs
tentatives, ils furent autorisés à venir avec la
même promesse que celle faite à l'autre village,
qu'ils s'en iraient volontairement s'ils
provoquaient des agitations ou s'ils rompaient
leur promesse. Conformément à cet accord, le
leader du village Mishongovi considérerait de les
accepter de nouvea u sur le Second Mesa ou de les
envoyer au New Mexico où les Indiens Pueblo
pourraient faire d'eux ce qui leur semblait
juste.

Plus tard, lorsque que nous fûmes forcés de
quitter le village d'Oraibi et que nous nous
installions à Hotvela, ils vinrent avec nous,
avec le même accord. Cet accord vaut toujours
aujourd'hui. De nouveau, ils provoquèrent des
agitations et furent obligés de s'en aller. Ils
sont le germe de toutes les destructions dans
notre village. Ils ont trahi la Nation Hopi parce
qu'ils s'inclinent devant ceux qui viennent avec
de jolis mots, et ce faisant, ils en tirent
profit et obtiennent des avantages. Pour eux, il
n'existe que deux façons d'agir : celle du Grand
Esprit ou celle de Bahanna. Ils furent obligés
d'aller à Mishongovi comme convenu. Les gens
là-bas les attendaient mais n'eurent pas le
courage de faire ce qu'ils avaient promis. Et ils
se cachèrent lâchement derrière la loi de Bahanna
inventée par les hommes.

Parmi les cérémonies de chaque groupe, la prière
pour la pluie était importante afin que la
récolte soit bonne et produise de la nourriture
en abondance. Le peuple en dépendait pour sa
survie. Les orgueilleux n'étaient pas admis afin
que les prières ne soient pas corrompues.

Oraibi était maintenant bien établi. Le schéma
des ordres religieux était établi. Cycle après
cycle, nous montrions à travers nos cérémonies
notre respect à notre Mère Terre, notre Père
Soleil, le Grand Esprit et à toute chose. Nous
étions heureux car unis.

L'arrivée d'une autre race comme prédit

Le temps passait, les gens passaient et la
prophétie des choses à venir passait de bouche en
bouche. Les tablettes de pierre et les écrits sur
les rochers étaient souvent regardés par les
anciens. Ils attendaient dans la crainte, en se
rappelant la prophétie selon laquelle une autre
race allait venir parmi eux et revendiquer leur
terre. Ces gens allaient essayer de changer notre
mode de vie. Ils auraient une "langue douce" ou
une "langue fourchue", ainsi que de nombreuses
choses pour nous tenter. Ils utiliseraient la
force pour nous obliger à sortir les armes mais
nous ne devions pas tomber dans ce piège car nous
allions être mis à genoux et nous ne serions plus
capables de nous relever. De même, nous ne
devrions jamais lever nos mains contre aucune
nation. Nous appelons aujourd'hui ces gens les
Bahanna.

Les forces de purification

Notre enseignement et nos prophéties nous
informent que nous devons rester vigilants aux
signes et aux présages qui surviendront afin de
nous donner le courage et la force de rester
fidèles à nos croyances. Le sang coulera. Nos
cheveux et nos vêtements seront éparpillés sur la
terre. La nature nous parlera avec le souffle
puissant du vent. Il y aura des tremblements de
terre, des inondations et des feux étranges en
différents endroits causant de grands désastres,
des changements dans les saisons. Le temps aussi
changera et la vie sauvage disparaîtra. La famine
apparaîtra sous différentes formes. La corruption
et la confusion grandiront parmi les leaders et
les peuples à travers la terre entière, et les
guerres surgiront comme des vents puissants. Tout
cela est prévu depuis le début de la création.

Nous auront trois personnes derrière nous, prêtes
à accomplir nos prophéties lorsque nous
rencontreront des difficultés désespérées : le
Symbole Meha (qui représente une plante avec de
longues racines, une sève lactée, qui repousse
lorsqu'on la coupe et qui a une fleur ressemblant
à un swastika, symbolisant les quatre grandes
forces de la nature en mouvement), le Symbole du
Soleil, et le Symbole Rouge. L'intrusion de
Bahanna dans la vie des Hopi mettra le Symbole
Meha en mouvement, et certaines personnes
travailleront pour les quatre grandes forces de
la nature (les quatre directions, les forces
prédominantes, la force originale) qui
balanceront le monde dans la guerre. Quand cela
arrivera, nous saurons que nos prophéties sont
vraies. Nous rassemblerons nos forces et
resterons fermes.

Ce grand mouvement chutera mais parce qu'il se
nourrit de lait et qu'il est contrôlé par les
quatre forces de la nature, il se relèvera pour
remettre le monde en mouvement, créant une
nouvelle guerre dans laquelle le Symbole Meha et
le Symbole Soleil seront à l'ouvrage. Ensuite, il
se reposera pour resurgir une troisième fois.
Notre prophétie prédit que ce troisième événement
sera décisif. Nos plans prévoient l'issue.

Cette écriture sacrée parle les mots du Grand
Esprit. Cela peut avoir un rapport avec le
mystérieux germe de vie contenant les deux
principes de demain, en indiquant un, dans lequel
se trouve les deux. Le troisième et dernier, que
va-t-il apporter, purification ou destruction ?

Ce troisième événement dépendra du Symbole Rouge,
qui va prendre le commandement, mettant les
quatre forces de la nature (Meha) en mouvement
pour le bénéfice du Soleil. Quand il mettra ces
forces en mouvement, le monde entier sera secoué
et deviendra rouge et se retournera contre les
gens qui gênent la vie culturelle Hopi. Pour tous
ces gens, le Jour de la Purification viendra. Les
gens humbles iront vers lui à la recherche d'un
nouveau monde et de l'égalité qui leur à été
refusée. Il viendra sans pitié. Son peuple
recouvrira la Terre comme des fourmis rouges.
Nous ne devrons pas sortir pour regarder. Nous
devrons rester dans nos maisons. Il viendra et
prendra les mauvais qui gênent les hommes rouges
qui furent ici les premiers. Il cherchera
quelqu'un qu'il reconnaîtra à son mode de vie, ou
à sa tête (la coupe de cheveux caractéristique
des Hopi), ou par la forme de son village ou de
son habitation. Il est le seul qui puisse nous
purifier.

Le Purificateur, commandé par le Symbole Rouge,
avec l'aide du Soleil et de Meha, expulsera les
mauvais qui ont dérangé le mode de vie des Hopi,
la vraie façon de vivre sur Terre. Le mauvais
sera décapité et ne parlera plus. Ce sera la
Purification pour tous les gens vertueux, la
Terre, et toutes les créatures vivant sur la
Terre. Les malades de la Terre seront guéris.
Terre Mère fleurira de nouveau et tous les
peuples s'uniront dans la paix et l'harmonie pour
les temps à venir.

Mais si cela ne se réalise pas, l'identité
traditionnelle des Hopi disparaîtra sous la
pression de Bahanna. Sous l'influence des hommes
blancs, ses religions, et la disparition de notre
terre sacrée, les Hopi seront ruinés. Ceci est le
Plan Universel, dicté par le Grand Esprit depuis
l'aube des temps.

Sachant cela, moi, Hopi, je ne me bats plus
contre aucun pays car si je le fais, le
Purificateur le découvrira et me punira pour ces
combats. Et comme je suis un Hopi, je n'envoie
plus mes enfants se battre de l'autre côté de
l'océan. S'ils veulent le faire, c'est à eux d'en
décider, mais ils ne seront plus Hopi s'ils le
font.

Comme je suis du Clan du Soleil, et le Soleil est
le père de toute créature, j'aime mes enfants.
S'ils comprennent ce que je suis en train de
dire, ils doivent m'aider à sauver le monde.

Les Hopi ont été placés de ce côté de la Terre
pour prendre soin de la terre par leurs services
cérémonials, de même que d'autres races ont été
placées ailleurs sur la Terre pour prendre soin
d'Elle à leur manière. Ensemble, nous maintenons
le monde en équilibre, nous le faisons tourner
correctement. Si la Nation Hopi disparaît, le
mouvement de la terre va se dérégler, l'eau va
engloutir la terre, les peuples vont périr et les
fourmis vont hériter de la terre. Seul un frère
et une sœur survivront pour commencer une
nouvelle vie.

Les Hopi fidèles passent leur épreuve

Bahanna vint avec de grandes ambitions et
beaucoup de générosité, offrant vivement son aide
pour "améliorer" notre façon de vivre. Il nous a
offert sa médecine et ses soins, disant que cela
nous aiderait à vivre plus longtemps. Il offrit
de nous aider à marquer nos frontières, disant
que de cette façon nous aurions plus de terre.
Dans tous nos villages, nous avons rejeté cette
offre. Il essaya de nous convaincre mais ne
réussit pas à nous soumettre car en ces temps,
nous étions unis, croyant en les instructions de
Maasau'u.

Sa tentative suivante fut la peur. Il forma une
force de police constituée en partie de certaines
personnes ayant été tentées par ses offres et
leur donna des armes. Il menaça de nous arrêter
et de nous mettre en prison, mais nous avons
encore résisté. Les menaces d'arrestations et
d'emprisonnements furent mises en application.
Les villages paniquèrent et les gens faibles
commencèrent à se soumettre. A Oraibi, le
commandement du village tomba lorsque Loloma (du
Clan de l'Ours) passa un accord avec le
gouvernement des Etats-Unis.

Nous qui avions encore foi en Maasau'u, et les
prêtres des ordres religieux, nous nous sommes
rassemblés et avons rejeté la demande de
soumission de Kikmongwi. Nous nous sommes assis,
avons fumé et prié pour être suffisamment
courageux afin de rester sur notre position. Nous
avons repris nos tablettes de pierre et les avons
étudiées dans les moindres détails. Nous avons
minutieusement revu le plan de route inscrit sur
le rocher près de notre village. C'est le plan
que nous devons toujours suivre car il est juste
et complet. Nous avons vu que le Clan du Feu
(c'est-à-dire mon père, Yukiuma) devait nous
guider car son symbole, Maasau'u, se trouve à la
droite du roseau alors qu'il le regarde. Nous y
avons aussi vu que comme notre mode de vie avait
été corrompu, nous devions nous rendre à un
nouvel endroit où nous pourrions suivre notre
route sans interférence et continuer nos services
cérémonials pour tout le monde.

Nous avons fumé et prié de nouveau et reconsidéré
que ce village, Oraibi, est notre mère village.
Nos lieux de pèlerinages sont ici et ne peuvent
être laissés sans surveillance. Nous savions que
la route allait être difficile et encombrée
d'obstacles. Nous savions que nous allions encore
être dérangés par les nouveaux venus, et que nous
allions devoir relever toutes les épreuves de
faiblesse, et nous avons décidé de rester.

Les problèmes commencèrent. Le gouvernement
voulut que tous les enfants Hopi aillent à
l'école. Ils disaient que cela nous ferait du
bien, mais nous savions que ce "bien" ne serait
que superficiel et qu'en réalité, il allait
détruire la vie culturelle Hopi. Peut-être
pensaient-ils que grâce à leur éducation, les
enfants seraient capables d'aider les anciens,
mais nous savions que ce ne serait pas le cas car
comme ils apprendraient à penser comme les hommes
blancs, ils n'aideraient jamais les anciens. Au
contraire, ils seraient endoctrinés et encouragés
à se retourner contre nous, comme ils le font
déjà aujourd'hui. Ainsi, afin de respecter les
enseignements du Grand Esprit, nous avons refusé
de mettre nos enfants à l'école.

Et chaque semaine ils nous envoyèrent la police.
Ils encerclaient le village et recherchaient les
enfants en âge d'aller à l'école. Nous ne
pouvions vivre en paix car nous craignions chaque
jour de nouveaux problèmes. Les pères qui
refusaient étaient arrêtés et emprisonnés. Des
actes inhumains tels la famine, les insultes et
l'humiliation nous ont été imposés, afin de nous
soumettre. La moitié des leaders de clan et des
leaders religieux refusèrent d'accepter quoi que
ce soit du gouvernement. A cause de cela, ceux
qui s'étaient déjà soumis se moquaient de nous et
nous traitaient en paria. Finalement, ils
décidèrent d'agir contre nous car nous les
empêchions de profiter des faveurs du
gouvernement.

Cela se passa lorsque le successeur de Loloma,
Tewaquaptewa, devint chef d'Oraibi. C'est sous
son commandement que le drame, l'éviction des
fidèles Hopi d'Oraibi, se déroula. Puisque que
nous, les "hostiles" comme nous étions appelés
par les missionnaires et les employés du
gouvernement, refusions d'exaucer ses souhaits et
d'accepter le mode de vie des hommes blancs, il
décida de nous expulser. Il s'imaginait que sans
notre interférence, il pourrait profiter des
bonnes choses offertes par Bahanna.

Les fidèles Hopi expulsés d'Oraibi

Le 7 septembre 1906, le chef Tewaquaptewa et ses
partisans entrèrent dans nos maisons alors que
nous étions en train de parler des prophéties et
ils nous jetèrent dehors. Nous n'avons pas
résisté car ils portaient des fusils et d'autres
armes placées bien en évidence. Ils commencèrent
à nous battre. Nous n'avons résisté que pour nous
éviter d'être blessé. Je fus "tué" et comme je
saignais, mon sang pénétrait la Mère Terre, un
signe prophétique que le Purificateur allait
venir dans sept jours et que nous devions quitter
Oraibi. Lorsque je revins à la vie, mon peuple
s'était rassemblé pour partir. Mon père, Yukiuma,
fut choisi pour nous guider. Les femmes et les
enfants, emportant quelques objets sur leur dos,
un peu de nourriture mais pas de chaussures,
étaient prêts à partir. Certains essayèrent de
retourner dans leur maison pour y prendre des
objets de valeur et de la nourriture mais ils en
furent empêchés. (Dans le Livre des Hopi, il est
dit que nous avons été autorisés à retourner dans
nos maisons pour y prendre nos biens mais ce
n'est pas vrai. Ce livre n'est pas exact.) Après
notre départ, nous avons appris que nos maisons
avaient été pillées, que les chevaux avaient été
lâchés dans nos champs et qu'ils avaient dévoré
nos cultures qui étaient prêtes à être récoltées.

Ainsi nous devions migrer une fois de plus et
trouver une nouvelle maison, laissant derrière
nous un monde corrompu et confus. Nous cherchions
à commencer une nouvelle vie, continuant nos
cycles cérémonials et préservant notre mode de
vie sans interférence mais aujourd'hui, nous
savons que c'était un rêve mort car les
interférences ont continué jusqu'à ce jour.

La création du village d'Hotvela

Le village d'Hotvela fut établi dans un seul but,
respecter les instructions du Grand Esprit et
accomplir les prophéties jusqu'au bout. Il fut
établit par de bonnes gens, des gens-à-un-coeur
qui vivaient réellement les instructions reçues.
L'eau était abondante, ainsi que le bois avec
lequel nous avons construit des abris temporaires
pour survivre durant l'hiver, avec seulement
quelques couvertures. La nourriture était rare
mais nous arrivions à vivre de la terre en
chassant le gibier et en cueillant des légumes.
Nous ne formions qu'un mais nous allions de
nouveau nous déchirer à causes des pressions
extérieures.

Nouvelles attaques

Nos empreintes de pieds avaient à peine disparu
d'Oraibi qu'un matin, tôt, nous nous sommes
retrouvés encerclés par les troupes du
gouvernement. Tout le monde, y compris les
enfants, fut obligé d'entreprendre une marche de
six miles (dix kilomètres) vers un endroit situé
en dessous d'Oraibi. De là, les hommes durent
encore marcher quarante miles (soixante-cinq
kilomètres) vers l'agence du gouvernement
américain située à Keams Canyon, où ils furent
emprisonnés durant un an et demi parce qu'entre
autres choses, ils refusaient l'offre généreuse
du gouvernement d'éduquer nos enfants.

La première chose qu'ils nous ordonnèrent fut de
signer des papiers. Nous avons refusé. Alors ils
nous ont enfermés durant plusieurs jours dans un
bâtiment, sans nourriture et avec très peu d'eau.
Ils ont ensuite essayé à nouveau de nous
persuader de signer les papiers, promettant de
nous donner de la nourriture et de nous laisser
partir mais nous avons encore refusé. Ils ont
tenté d'autres astuces pour nous faire signer
mais chaque fois, nous avons refusé. Finalement,
ils nous emmenèrent dans une forge où ils
fixèrent des chaînes à nos jambes, avec des
anneaux et des crochets, et nous attachèrent par
deux. C'est de cette façon que, chaque jour, nous
avons été obligés de travailler durant de longues
heures, travaillant dangereusement avec de la
dynamite sur les pentes escarpées des montagnes
près de l'agence. Cette route servit de fondation
à une autoroute encore utilisée aujourd'hui.

La nuit, nous étions attachés par six au moyen
d'une longue chaîne. Pour augmenter notre
torture, ils mélangeaient du savon à notre
nourriture, ce qui nous rendit fort malade.
Lorsque l'un de nous devait aller aux toilettes,
les cinq autres devaient l'accompagner. Durant
tout ce temps, la possibilité de signer les
papiers fut offerte à ceux qui faibliraient.
Pendant cette période, mon père Yukiuma fut amené
ailleurs et c'est à moi que revint le rôle de
leader.

Lorsque nous étions en prison, seuls les femmes,
les enfants et quelques vieux ont pu rester
dehors. Ils avaient très peu de nourriture mais
comme par miracle, les lapins et d'autres gibiers
étaient abondants cet hiver. Grâce à cette
viande, ils parvinrent à survivre au temps
extrêmement froid. Les temps étaient très durs
lorsque les hommes n'étaient pas là. Les anciens
en parlaient souvent. Les femmes devaient
ramasser le bois. Ma mère me racontait comment
elles partaient à la chasse en emmenant les
chiens pour les aider. Nous avions un petit
troupeau de moutons dont elles s'occupaient
durant notre absence. A la bonne saison, elles
plantaient le maïs, s'occupaient des champs et
faisaient tout le travail normalement réservé aux
hommes, afin de pouvoir survivre.

La perturbation continue aujourd'hui

Durant cette période, un groupe emmené par
Kawonumptewa (du Clan du Sable), craignant encore
plus de pression de la part du gouvernement,
retourna à Oraibi pour suivre Tewaquaptewa et
accepter le mode de vie des hommes blancs, mais
ils furent rejetés et renvoyés. Ils
s'installèrent à deux miles d'Hotvela (trois
kilomètres et demi), où ils fondèrent le village
de Bacobi. Incapables de se débrouiller seuls,
ils demandèrent l'aide de l'agence du
gouvernement. L'agence profita de l'aubaine pour
leur rendre service et leur offrit, parmi
d'autres choses, du matériel pour construire des
maisons. Ils avaient maintenant accepté presque
entièrement le mode de vie de l'homme blanc, y
compris sa religion. D'après la loi du Grand
Esprit, ils se retrouvaient sans terre. La seule
chose qu'ils possédaient était leurs maisons.
Mais c'est à cause d'elles que l'agence eut la
permission de construire une école sur la terre
d'Hotvela et avec le soutien de l'agence, ils
décidèrent de s'emparer de la terre du peuple
d'Hotvela. C'est aussi à cause d'elles que le
gouvernement bâtit un château d'eau à Hotvela,
qui en fournissant de l'eau à l'école et au
village de Bacobi, épuisait les ressources
naturelles en eau du peuple d'Hotvela. La plupart
des gens d'Hotvela refusèrent d'utiliser cette
eau. La majorité des problèmes causés par les
gens de Bacobi existent encore aujourd'hui. Je me
souviens de beaucoup d'autres qui j'espère ne
seront jamais révélés.

Aujourd'hui, nous courons le danger de perdre
complètement notre terre. Sous l'influence du
gouvernement des Etats-Unis, certaines personnes
d'ascendance Hopi ont créé ce qu'elles appellent
le Hopi Tribal Concil (Conseil Tribal Hopi),
organisé selon les directives du gouvernement,
dans le but de négocier directement avec le
gouvernement et les hommes d'affaires. Ils
affirment agir dans l'intérêt des Hopi, malgré le
fait qu'ils rejettent les leaders traditionnels
et qu'ils ne représentent qu'une petite minorité
de personne de sang Hopi. De grandes parties de
notre terre ont été louées et ce groupe accepte
maintenant des compensations de l'Indian Claims
Commission (Commission des Concessions Indiennes)
pour l'utilisation de quarante-quatre millions
d'acres de terre Hopi (dix-huit millions
d'hectares). Nous avons protesté mais sans
résultat.

Ce Conseil Tribal fut créé illégalement, même si
l'on se réfère aux lois de l'homme blanc. Nous,
les leaders traditionnels, avons marqué notre
désaccord et avons protesté dès le début. Mais
ils ont été organisés et reconnus par le
gouvernement des Etats-Unis pour que celui-ci
puisse camoufler ses mauvais agissements au reste
de monde. Nous ne sommes pas représentés dans
cette organisation, de même que nous ne sommes
pas légalement tenus de respecter ses lois et ses
programmes. Nous les Hopi sommes une nation
souveraine indépendante dirigée par la loi du
Grand Esprit mais le gouvernement des Etats-Unis
ne veut pas reconnaître les leaders autochtones
de ce pays. Au contraire, il ne reconnaît que ce
qu'il a créé lui-même à partir de nos enfants,
afin d'appliquer son plan visant à s'approprier
la totalité de nos terres.

Et c'est pour cette raison que nous faisons face
aujourd'hui à la plus grande des menaces, la
perte de nos champs de maïs et de nos jardins, de
nos animaux, du gibier et de notre réserve
naturelle d'eau, ce qui mettra un terme au mode
de vie Hopi. Sous l'insistance du Département de
l'Intérieur des Etats-Unis, le Conseil Tribal a
signé de nombreux baux avec une entreprise
privée, la Peabody Coal Company, lui permettant
de fouiller notre sol à la recherche de charbon
et de dépouiller les mesas sacrées en vendant le
charbon à plusieurs centrales électriques. Ceci
n'est qu'une partie d'un projet visant à
implanter des industries lourdes sur nos terres
et cela contre notre volonté. Nous savons que
cela polluera les champs et les pâtures et
chassera la faune sauvage. De grandes quantités
d'eau seront pompées dans notre désert afin de
conduire le charbon à travers un pipeline dans
une centrale d'un autre état (Nevada). La perte
de cette eau affectera nos fermes et la pâture
des animaux. Ce la menace aussi nos sources
sacrées, notre seule source naturelle en eau,
dont nous dépendons depuis des siècles.

Nous, Hopi, savions que tout cela allait se
passer parce que tout est inscrit dans le Plan
Universel. Il fut prévu par le Grand Esprit et le
Créateur que lorsque l'homme blanc viendrait, il
nous offrirait beaucoup de choses. Si nous
acceptions les offres de son gouvernement, cela
signifierait la ruine de la nation Hopi. Les Hopi
sont le sang de ce continent comme d'autres sont
le sang d'autres continents. Ainsi, si les Hopi
échouent, le monde entier sera détruit. Cela nous
le savons car la même chose est arrivée dans
l'autre monde. Donc, si nous voulons survivre,
nous devons retourner à notre ancien mode de vie,
celui qui est paisible, et accepter de suivre les
dispositions du Créateur.

Les lois de l'homme blanc sont nombreuses, la
mienne est unique. Les lois de l'homme blanc sont
confuses. Tellement de gens ont fait ces lois, et
chaque jour en apporte de nouvelles. Mais ma loi
est seulement celle du Créateur, seulement
celle-la. Et je ne dois suivre aucune des lois
créées par l'homme parce qu'elles changent tout
le temps et entraîneront la destruction de mon
peuple.

Nous savons que quand le temps viendra, les Hopi
seront réduits à peut-être une seule personne,
deux personnes, trois personnes. Si nous pouvons
résister à la pression de ceux qui sont contre la
tradition, le monde pourra survivre à sa
destruction. Nous en sommes à un moment où je
dois rester seul, libre de toute impureté. Je
dois continuer à conduire mon peuple sur la route
que le Grand Esprit a tracée pour nous. Je ne
rejette personne. Tous ceux qui sont fidèles et
confiants dans la voie du Grand Esprit ont la
liberté de suivre la même route. Nous
rencontrerons beaucoup d'obstacles tout au long
du chemin. Le chemin paisible de la vie ne peut
être accompli que par ceux qui ont beaucoup de
courage et par la purification de toutes les
créatures. La maladie de la Mère Terre doit être
guérie.

Comme nous le disons, les Hopi furent les
premiers hommes à être créés. Ils doivent guérir
les maladies de leur propre sang pour que tout
redevienne paisible naturellement, par la volonté
du Créateur. Il guérira le monde. Mais en ce
moment, les Hopi sont blessés. Pour nous, c'est
un signe que le monde est en danger. A travers la
terre entière, des gens pleins de confusion se
battent, et ce sera pire encore. Seule la
purification des Hopi peut résoudre les problèmes
ici, sur cette Terre. Nous n'avons pas subi
toutes ces épreuves et ces punitions pour rien.
Nous vivons par ces prophéties et ces
enseignements et quoi qu'il arrive, aucune
pression ne nous affectera.

Nous savons que certaines personnes sont chargées
de provoquer la Purification. C'est le Plan
Universel depuis le début de la création et nous
attendons ceux qui nous apporteront la
purification. Cela est écrit sur des rochers à
travers le monde, dans différents continents.
Nous nous rassemblerons si tous les peuples du
monde en prennent connaissance. Aussi, nous vous
exhortons de faire passer le message pour que
tout le monde puisse savoir et que ceux qui
auront été désignés s'activent dans leur tâche de
purifier les Hopi et de se débarrasser de ceux
qui perturbent notre façon de vivre.

J'ai parlé. J'espère que ce message voyagera aux
quatre coins de la terre et qu'il traversera les
grandes eaux, où des gens de compréhension
pourront considérer ces mots de sagesse et de
connaissance. C'est ce que je veux. Les gens
peuvent avoir différentes opinions mais à cause
de la nature des croyances sur lesquelles la vie
des Hopi est basée, j'espère qu'au moins une
personne sera d'accord, peut-être même deux. Si
trois sont d'accord, alors cela en vaudra
vraiment la peine.

Je prierai toujours en regardant à l'Est vers le
soleil levant pour que mon fidèle frère blanc
vienne et purifie les Hopi. Mon père, Yukiuma, me
disait que je serais celui qui sera le leader à
ce moment-là car j'appartiens au Clan du Soleil,
le père de tous les peuples de la Terre. J'ai été
prévenu que je ne devais pas abandonner parce que
je suis le premier. Depuis la première création,
le Soleil est le père de toutes les créatures. Et
si avec moi, le Clan du Soleil disparaît, il n'y
aura plus d'êtres vivants sur la Terre. Alors
j'ai tenu bon. J'espère que vous comprendrez ce
que j'essaie de vous dire.

Je suis le Soleil, le père. Toute chose est créée
avec ma chaleur. Vous êtes mes enfants, et je
suis très inquiet pour vous. Je prends soin de
vous pour que vous soyez protégés du mal mais mon
cœur est triste de vous voir quitter ma
protection et vous détruire. Du sein de votre
mère, la Terre, vous avez reçu votre nourriture,
mais Elle est trop gravement malade pour pouvoir
encore vous nourrir sainement. Que va-t-il se
passer ? Allez-vous élever le cœur de votre père
? Allez-vous guérir votre mère de ses maladies ?
Ou allez-vous nous abandonner, nous laisser à
notre tristesse, et être emportés ? Je ne veux
pas que ce monde soit détruit. Si ce monde est
sauvé, vous serez tous sauvés et quiconque a tenu
bon réalisera ce Plan avec nous, afin que nous
soyons tous heureux et que nous puissions vivre
en paix. De partout, les gens doivent prendre les
Hopi en considération, nos prophéties, nos
enseignements et nos services cérémonials car si
les Hopi échouent, cela déclenchera la
destruction du monde et de l'humanité. J'ai parlé
par la bouche du Créateur. Puisse le Grand Esprit
vous guider sur bon chemin.